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Imposture
Je te vois
Je te vois lorsque tu viens par le chemin étroit, de l’autre côté de la route
Je te vois lorsque tu fuies par la petite fenêtre de la cour
Je te vois lorsque tu entres en souriant dans ta forêt de papier
Je te vois quand tu quittes mon lit en silence
Quand tu laisses la porte entr’ouverte pour faire taire la serrure
Je te vois tout le temps, où que tu sois, où que tu te caches, qui que tu sois
Non, tu te trompes
Je suis invisible, je suis un menteur, un mystificateur
Tu ne vois que ton mirage
Et les autres ne voient que le mirage qui porte le nom que tu m’as donné une nuit sans lumière
Je sais que face au miroir je ne suis qu’une énigme, un inconnu de passage
La mer, ma mer n’est plus qu’un peu d’eau que je porte dans un flacon de parfum volé quelque part
La fontaine du village n’a jamais existé
Seuls les mots enfoncés dans la terre rouge ont un peu de vérité
Un peu seulement
Car, eux aussi, je les ai travestit avec la sueur de mon ombre
Alors, comment devrais-je m’habiller pour aller sur ta tombe ?
Dans quel cimetière, dans quel récif éloigné auront été versées tes cendres ?
Quel jour de l’année sera ton jour des morts ?
Ce sera un jour comme un autre
Un jour chaque fois différent
Ce sera un nuage qui coupe un instant le soleil
Un brasillement de lune en été
Mais il n’y aura pas de lieu prescrit
Il n’y aura pas de marque, de trace, de stèle souvenir
Tu devras chaque fois, si tu le veux encore
A ton tour tout inventer, mentir aux autres et à toi-même
Alors, peut-être, peut-être.
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