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    Tout est blanc, ce matin. Voila une promesse tenue dans le flot de paroles qui s’envolent comme des oiseaux en perdition.

    Sauf que, celle-ci, on aurait pu s’en passer !

    Je voulais faire une nouvelle Barbara et faire l’été au cœur de l’hiver. Ça n’a pas marché.

     

    Alors, ne regardons que le bon coté des choses :

    Dans notre belle Ville, les voitures apeurées vont rouler au pas et nous allons arriver en retard malgré tous nos efforts.

    Les coups de sang suivant les râleries, elles-mêmes suivant les heures de trop enfermés dans nos coques métalloplastiques  vont blanchir nos cheveux


    A moins de prendre les choses du bon coté, de partir à pied avec la belle veste à carreaux et s’inviter chez Marinette à combattre le froid ensemble, avec le sourire, tout contre, tout contre.

     

    Vive la neige!


     


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  • -C’est votre chien ?

    -Oh ! non,

     

    Depuis qu’il s’était assis de l’autre coté du banc où je lisais, j’ai senti qu’il souhaitait engager la conversation, mais alors, parler du chien, cela n’avait aucun sens, je n’avais pas sur moi une laisse, ni une chaîne ou même une corde, quelle idée !

     

    -Non, non, ce chien n’est pas à moi ; j’ignore même s’il appartient à quelqu’un. Il a commencé à errer près du banc lorsque vous êtes arrivé, d’ailleurs !

     

    -Je ne voulais pas vous froisser, mais il m’a semblé qu’il revenait tout le temps auprès de vous. A bien regarder, j’aurais dû comprendre mon erreur d’estimation, car ce brave chien n’a rien qui fasse penser à vous, ce n’est pas votre style, votre profil et vous avez certainement remarqué que les chiens ressemblent à leurs maîtres.

     

    -Comment serait alors votre chien, si vous en aviez un ? Mais peut être en avez-vous un.

     

    -Non, je n’en ai plus, le mien m’a quitté, enfin, il a disparu il y a quelques mois et ni affiches ni offre de récompense ne m’ont permis de le récupérer. Au dire de tous, il me ressemblait ; Il était grand, avec un poil lisse et brillant et toujours de bonne humeur. Très sociable, comme moi ; Il s’approchait de tout le monde avec une allure de chiot joueur, pour plaire, puisqu’il ne pouvait pas parler. C’est certainement à la suite d’une de ces tentatives de conquête que quelqu’un se l’est approprié. C’est certainement cela, de lui-même il ne m’aurait jamais abandonné.

     

    -Ne lui prêtez-vous pas beaucoup de réflexion pour un chien ? C’est peut être son absence qui vous amène à enjoliver ses capacités ; Ce n’était qu’un chien, tout de même.

     

    -Je vois bien que vous n’avez jamais eu de chien ! Vous n’avez peut être jamais été un homme seul, peut-être que la compagnie d’un être vivant et soucieux de vous ne vous a jamais manqué. Moi si et seul mon chien m’a aidé à surmonter la tristesse de cet état. Lui m’offrait en permanence sa gaîté, son énergie. Il ne me laissait pas me pencher sur moi-même, tant il était en permanence exigeant, désireux de bouger, me poussant à sortir, à me promener, à venir dans ce parc.

    Je m’asseyais dans un des bancs qui entourent le grand parterre, un banc comme celui-ci et lui faisait des innombrables allées et venues, jouant dans le parc et vérifiant régulièrement que j’étais bien là et que je lui dirai quelques mots aimables à chaque approche.

     

    -Je vous demande pardon, je ne pouvais pas imaginer. Je comprends maintenant que voyant ce chien s’approcher de moi vous ayez pensé qu’il était à moi. Mais contrairement à vous, je ne suis pas un homme seul, je suis un homme solitaire ; Je ne cherche pas spécialement une compagnie, au contraire. Je viens ici presque tous les jours depuis quelques semaines pour lire mon journal ou un livre, pour réfléchir, parfois simplement pour me reposer d’une longue marche, mais sans chercher de la compagnie.

     

    -Je vous gène, donc !

     

    -Non, pas vraiment.

    J’ai été surpris lorsque vous m’avez parlé et il me semblait évident que vous vouliez entamer une conversation alors que moi je voulais lire tranquillement mon journal sans être troublé. Mais ce que vous me dites me dévoile des aspects de la vie que je ne soupçonnais pas. Je suis de toujours un peu ours et je ne me suis jamais trop préoccupé d’être en contact avec des êtres réels. Je lis les journaux, je donne de l’argent à des œuvres caritatives car les nouvelles m’apprennent qu’il y a partout des problèmes, ici et ailleurs, mais je n’ai jamais estimé nécessaire de m’impliquer autrement, de me lier personnellement avec un ami, ou une épouse, qui aurait ses propres visions de la vie, ses propres besoins. Non, je suis solidaire de tous les malheurs, mais je ne souhaite pas les partager autrement que par mon aide matérielle, de loin, sans contact physique.

     

    -Pour moi, ce que vous dites-là est terrible! Je ne peux pas vous concevoir autrement que malheureux. Peut être êtes vous aveugle vers votre intérieur ou votre cerveau est désensibilisé, dépourvu de quelques volutes pour moi vitales. Je crois que je mourrais si je devais m’astreindre à une telle forme de vie.

    Quel sens ont les autres personnes si on ne peut pas les approcher, les toucher, échanger avec elles quelques mots de joie ou de tristesse, peu importe, mais des mots chauds, maladroits certainement, mais sonores.

    L’argent peut aider certains à acheter  des choses, mais il ne remplit jamais un rôle de consolation, de partage. Tout être, avant même de manger, de se faire soigner, de se vêtir, tout être a besoin d’abord d’une caresse, d’un mot doux, d’un sourire d’amitié. D’un autre humain ou d’un chien, ou d’un chat.

     

    -Vous exagérez certainement. Je ne suis plus un jeune homme et je ne crois pas non plus être un homme unique ; Quantités d’autres personnes pensent et sentent certainement comme moi. D’ailleurs, vous avez beaucoup plus de gens qui donnent de l’argent à des œuvres que des gens qui vont caresser des malades ou bavarder avec des clochards à moitié déshabillés. Vous êtes comme vous êtes et je suis content de vous observer et de vous écouter ; C’est en quelque sorte une curiosité scientifique, mais ne vous croyez pas un modèle et encore moins représentatif d’une majorité.

    La vie serait trop compliquée si chacun devait s’entourer des malheurs des autres. Ce serait trop lourd.

     

    -Je crois, au contraire, que ce qui rend la vie compliquée est la solitude de chacun, son face à face avec ses malheurs sans un appui direct, concret, physique.

    Si vous aviez raison, tous les problèmes de l’humanité auraient été résolus depuis fort longtemps. De l’argent, il y en a toujours quelque part, mais pour les malheureux la capacité de le trouver, l’envie même de l’accepter ne peuvent réellement exister qu’avec l’appui d’une main chaude, d’un bon conseil, d’un regard souriant, d’un bras aidant à en supporter le poids.

     

    J’étais arrivé au terme de mon journal et j’avais trop entendu. Voilà que je me trouvais la cible de critiques, moi qui n’avais rien fait d’autre que de lire mon journal tranquillement assis, sans rien demander à personne.

    Je suis rentré chez moi, dans la seule intimité qui m’importe, celle avec moi-même, mais en tout cas ; c’est bien décidé : Jamais je n’aurai un chien, ni même un chat, quant à un ami, franchement, je n’en vois pas l’utilité.

    J’ai juste souscrit une police d’assurance obsèques pour que des mercenaires creusent ma tombe le moment venu et me portent en terre. Ce n’est  pas cher et c’est bien suffisant.

     

    © Jorcas


     


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  • L’eau coulait le long des troncs des arbres. On aurait dit les larmes des branches les plus hautes, tristes de l’abandon d’un soleil parti ailleurs, dans d’autres terres, plus hospitalières, chez d’autres êtres plus enclins à le voir encore comme le roi de la création.

    Rien n’aurait permis d’en faire la prophétie.  Pas un clochard des rues ne se serait risqué à décrire un tel tableau. Pas une diseuse de bonne fortune n’aurait mis en péril son aura avec un avis aussi sombre. Mais le soleil semblait bel et bien préparer un départ inhabituel. Peut être prenait-il des grandes vacances. Peut-être avait-il besoin d’une longue période sabbatique pour se ressourcer  avant de reprendre pour quelques milliers d’années sa course monotone pour chauffer une terre qui ne semblait plus se soucier de ses rayons, de ses colères, de ses grandes plages magnétiques lancées à grand renfort de flammes dans son espace immense et lointain.

    Pendant ce temps, quelques ramages inconnus, quelques arbustes originaires de zones inhospitalières avançaient en silence, se nourrissant de lune et de glace, mettaient au point une stratégie de floraison leur permettant d’attirer l’œil des humains et des insectes, surtout des insectes. L’eau pourrait sautiller de feuille en feuille sans jamais trouver leur tronc. Les troncs des arbres tombés au sol disparaitraient sous leurs racines, servant dorénavant  de cachettes à quelques minuscules rongeurs qui assumeraient  la lourde tâche de faire résonner  sur terre le tambourinement de leurs pattes. Peut être quelques oiseaux viendraient timidement porter leurs chansons, leurs couleurs et leur vie agitée autour des nouveaux habitants.

    Peut être qu’en fin de compte la Terre redeviendrait, après la folie destructrice des humains, presque tous partis en fumée lors du Grand Cataclysme, un lieu accueillant, pacifique, rieur, que le Soleil viendrait à nouveau réchauffer de ses mains douces et tièdes.

     

    © Jorcas


     


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    J’ai écrit quelque chose à ton intention : Une histoire machiavélique qui te fera peur ligne après ligne !

     

    Cela me pose un petit problème : Je n’aime pas avoir peur.

     

    Alors, que veux tu que je fasse de mon récit ? La peur est à la mode dans les livres, au cinéma. Plus personne ne peut échapper à quelques tremblements par-ci par-là. Tu devrais me lire pour avoir ta petite dose. Tu ne serais que plus à la page !

     

    Je revendique la possibilité, le droit même de ne pas suivre une mode qui ne me plait pas. Que va-t-il m’arriver ? Je n’aurais pas de petite amie, car elle voudrait avoir peur de moi et me faire peur à son tour ? Les commerçants refuseraient de me vendre leurs produits parce qu’avec ma façon d’être ils ne pourraient pas avoir peur de ne pas être payés ? Tu ne seras plus mon ami parce que je ne veux pas te lire pour le plaisir que tu aurais de me faire peur ?

     

    Tu pousses le bouchon un peu loin, comme si tu voulais m’effrayer, me rendre responsable de suivre la demande, de faire comme tout le monde pour être encore un peu lu.

     

    L’histoire n’alla pas plus loin. Chez l’un parce qu’il a eu peur que de trop insister son ami ne veuille plus lui accorder son amitié, chez l’autre parce qu’il trouvait savoureux de lui faire craindre un tournant de la mode qui l’obligerait à écrire des sujets rose bonbon avec final heureux et des grandes dégoulinades de sucre candi.

     

    Bref, de manière salutaire, il ne s’est rien passé et seuls les vraies assassins continueront à effrayer le bourgeois, lequel leur rend bien la monnaie avec la menace de tirer à vue dès qu’une ombre de simple passant  malencontreusement projetée sur un mur  pourrait faire croire à la éventualité qu’un crime digne d’Alan Poe va être commis.

    © Jorcas


     


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    Une année qui commence çà vous interpelle, même si vous vous cachez derrière la grande armoire de Tante-je-ne-sais-plus-le-nom pour faire croire à une absence.

    Le tout c’est de ne pas se laisser aller aux mauvaises habitudes qui peuvent vous conduire à des culs de sac sombres, d’où vous sortez en marchant en arrière de peur de tourner le dos. Mal à l’aise, qui plus est.

    Surtout ne rien promettre. Ne pas jurer de s’améliorer, de faire une prouesse. Ou alors, dites-le pour votre seul for intérieur. Evitez les témoins  qui ne manqueront pas de vous mettre le nez dans la trahison, si par malheur, comme d’habitude, vous oubliez votre parole dès le lendemain.

     

    Moi qui vous parle, j’ai commencé de cette manière ma traversée des planètes.  Mon intention première était de faire un tour sur la Lune, qui, je m’étais laissé dire, avait un arrière inconnu fort présentable, peut être même plus avenant que le devant.

    Ce beau derrière était vraiment  sombre et je me suis perdu comme le premier venu. Mais on m’avait entendu jurer d’y aller  dès que les douze cloches auraient sonné. Je ne pouvais pas me déjuger, j’aurai perdu mon aura de Grand Conquérant.

    Et j’ai continué ma marche.


    J’avais espoir, puisque l’arrière de la Lune était si sombre, de trouver des plus beaux derrières un peu plus loin. Et me voilà d’aérolite en aérolite parti à la recherche d’un envers plus accessible.

    Un grand classique, que de se perdre dans l’espace. Ce n’est pas tellement qu’il soit infini, c’est qu’il n’est pas du tout balisé. Si j’avais été meilleur étudiant, j’aurai su que beaucoup de littérateurs et non des moindres, s’étaient égarés dans l’aventure, qu’il valait mieux trouver autre chose.

     

    Trop tard. J’ai dû descendre sur terre sans preuve du moindre exploit, obligé de laisser dire ceux qui m’avaient entendu crâner, que je n’avais pas su reconnaître le meilleur morceau de la Lune.

    Il y a une morale à la chose : Inventez directement l’histoire telle que vous auriez aimé la vivre. On ne vous croira pas, mais on ne vous croira pas non plus si vous annoncez avoir fait le satellite du satellite aidé seulement de quelques coupes de champagne. Et si ça marche, c’est vous qui rirez le dernier.

    © Jorcas


     

     


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